En 2014 paraissait le livre "Code Evangile", tome 1 "Le vase de Bamberg", où le héros russe, l'espion Voronime, portait la montre Fréret Roy 1818 Coeur Ouvert Nouvelle Vague... cadeau de l'auteur, mon ami l'écrivain Jean-Pierre Maurel qui écrivait sous le pseudonyme Paul Hornet... Je vous encourage vivement à vous procurer ce polar à la fois scientifique et haletant... Voici un extrait de la suite des aventures de Voronine qui vient rendre visite à son horloger parisien, Michel Fréret-Roy...
En avant première, Chapitre "Voronine à Paris!
Choustov l’avait appelé la veille. Comme à leur habitude, quelques mots avaient suffis pour que Voronine, toutes affaires cessantes quitte son repaire du Mont Altaï en Sibérie Occidentale pour rejoindre Moscou.
Voronine regarda sa montre Fréret-Roy 1818. Les aiguilles luminescentes de son Cœur Ouvert Nouvelle Vague illuminaient l’aube naissante alors qu’il sonnait à la porte de son mentor. Il trouva celui-ci, assis à son bureau, tassé comme à son habitude comme un homme-tronc. Il ne put s’empêcher d’esquisser un sourire en pensant que ce petit homme était sans doute aussi puissant que le maître du Kremlin… Choustov le regarda fixement devinant ses pensées et Voronine, surpris comme un enfant en train de plonger les doigts dans la confiture, repris l’air sérieux dont il ne se départissait que rarement.
Gricha, tu vas te rendre à Paris. Depuis les troubles en Ukraine, les français sont devenus irrationnels. J’en veux pour preuve l’hostilité et les sanctions de ce gouvernement à l’encontre de notre pays avec notamment cette affaire des Mistral qui a fait déborder le vase. Tu es le seul en qui j’ai confiance. Je veux que tu ailles « respirer l’air de Paris », et que tu me dises comment tu ressens l’hostilité des français envers la Russie et aussi comment est perçue la menace islamiste après ces fameux attentats du 7 janvier que le pouvoir socialiste français a montés en épingle. En même temps, intéresse-toi à l’homme du Vatican, ce John Quantius, que je trouve bien calme ces dernières semaines, je ne sais pas ce qu’il mijote. Pour cela tu vas revêtir le costume d’un oligarque en promenade à Paris. Grâce à Dieu, tu n’es pas interdit de séjour dans le pays et personne ne t’y connait, mis à part ton horloger! Tu as carte blanche et noire aussi ! Et dans un sourire malicieux Choustov lui tendit une carte Amex Black, en métal, la fameuse carte aux dépenses presque illimitées, seule exception autorisée au boycott des produits américains. Voilà pour tes dépenses de services et tes faux frais personnels. D’ailleurs, tu commences maintenant, je veux que , pour cette fois au moins, tu ressembles à un riche moscovite en promenade, alors à toi de jouer !
Ce disant, Choustov lui tendit la main en lui disant « bonnes vacances » et Voronine la lui serra sans ajouter un mot de plus. Ils avaient déjà trop parlé.
« A toi de jouer », la phrase résonnait dans sa tête, comme l’onde de choc d’un marteau frappant une cloche ! Comment Choustov connaissait-il l’existence de son horloger dont jamais il ne lui avait parlé ? Décidément cet homme était insondable, mais puisqu’il l’y encourageait, Voronine décida justement de « jouer ». Lui, qui ne s’était jamais intéressé aux fastes de la société capitaliste, décida qu’il était temps pour lui de se glisser - ne serait-ce que pour cette mission – dans une peau qui n’était nullement la sienne.
Même s’il avait des goûts simples et ascétiques, à bien y songer, l’idée le réjouissait et s’il n’avait au départ aucune affinité avec ces fameux oligarques, il commençait à se prendre au jeu. Il se souvint alors de ses conversations avec son ami l’horloger parisien, savant mélange d’élégance british mâtinée de créativité milanaise. Il se souvint que ce dernier était adepte de marques de luxe atypiques et peu connues du grand public, comme l’italienne Pal Zileri ou Bommezzadri. Il se rendit donc dans l’une des boutiques présentant les griffes italiennes, le magasin Odezhdy situé en plein centre de Moscou qui lui parut idéal pour choisir sa nouvelle garde robe… Et puis, les italiens étant les européens les plus proches des russes en ces temps troublés , il prit plaisir à dévaliser la boutique, adoptant le look d’un homme d’affaires russe fortuné. Deux ensembles vestes et pantalons coordonnés et deux costumes chics feraient parfaitement l’affaire.
Alors qu’il se livrait aux derniers préparatifs de sa mission, il prit même un malin plaisir à boycotter tout produit ou service pouvant appartenir à des intérêts américains, ne voulant surtout pas enrichir l’oncle Sam … Juste retour de bâton pensa-t-il , alors qu’il réservait voiture et hôtel… Après avoir songé à réserver à l’hôtel du groupe singapourien Shangri-La de l’Avenue d’Iéna, le plus proche de l’Avenue Paul Doumer où se trouvait le repaire de John Quantius, il en avait abandonné l’idée en voyant le prix outrancier demandé pour une chambre, plus de 1000 euros sur Booking ! ! Il s’était finalement décidé pour un hôtel plus intimiste, à taille humaine et indépendant, propriété de la même famille depuis plus de 100 ans, le Bedford, que lui avait recommandé son horloger. Rien à voir avec le Shangri-La, mais il répugnait à dépenser autant pour une simple chambre d’hôtel au frais de la mère patrie!
Le vol régulier N°2450 de la compagnie russe Aeroflot s’était posé à l’heure prévue, 10h45, voyage confortable et sans histoire dans cette « Classe Affaires » particulièrement confortable où il avait pu étrenner sa nouvelle veste infroissable en cachemire soie bleue signée Bommezzadri, assortie à un pantalon gris en laine fine, auxquels, à sa grande surprise, il s’était habitué immédiatement... Comme quoi, même le plus austère des spetsnaz pouvait goûter au luxe !
Mais il ne se décida pas pour autant à changer toutes ses habitudes, son l’expérience lui ayant murmuré à l’oreille qu’il était préférable qu’il garde ses bagages avec lui en cas de départ précipité comme cela lui était bien souvent arrivé… Il quitta donc la cabine en emportant ses nouveaux bagages cabines italiens flambants neufs et s’engouffra dans la somptueuse limousine « indienne » , une Jaguar XJL réservée depuis Moscou. Installé confortablement comme dans un salon roulant, il intima au chauffeur l’ordre de rejoindre son hôtel. Installé confortablement comme dans un salon roulant, il intima au chauffeur l'ordre de rejoindre son hôtel. Discret et luxueux à la fois, Le Bedford se trouvait Rue de l’Arcade, à quelques centaines de mètres de sa boutique fétiche, Fréret-Roy. Il lui suffisait de traverser la Place de la Madeleine , puis le Boulevard et la Rue des Capucines se retrouver à l’angle de la Rue de la paix et de la place Vendôme, précisément au 30 Rue Danielle Casanova… Sa première mission !
A 11h30 précises – il savait qu’il ne fallait pas arriver avant - il sonnait à la porte de la boutique. Une tête émergea du fond de la boutique, le regard scrutateur, l’horloger-créateur également joaillier, Michel Fréret-Roy « himself » se déplaça lentement vers l’entrée. Toujours attentif à qui sonnait à sa porte depuis les braquages qu’il avait subis, il avait immédiatement reconnu son client le plus atypique, en dépit de son nouveau « déguisement » oligarchique. Il lui ouvrit aussitôt la porte. « Dobri dien Tovaritch ! » dit-il en prenant un accent rocailleux à souhait que d’aucuns auraient pu prendre pour une moquerie mais qu’il ne pouvait s’empêcher d’adopter quand il savait à qui il s’adressait. Le russe lui répondit sur le même ton : « Bonjour Président » ! Comme Voronine avait pris l’habitude de l’appeler depuis qu’ils se connaissaient ! Et un grand rire commun ponctuait en général ces retrouvailles…
Oh mais tu as changé de style Gricha ! Te voilà bien élégant pour un soviet , tu as eu une promotion ? Le français aimait jouer avec le russe, le provoquer avec humour, et ce dernier s’en amusait une fois de plus… Voronine se dit soudain qu’il n’aurait pas supporté cela de grand monde, mais il ne pouvait l’expliquer, l’horloger l’intéressait et l’intriguait, sans doute parce qu’il avait chassé à trois reprises des braqueurs armés de sa boutique en se battant avec eux ou encore parce que , dans une vie antérieure, il avait parcouru le monde pour de grands groupes de travaux publics français, assurant la promotion d’affaires dans des pays aussi variés et agités que le Libéria, le Ghana, le Zimbabwe, l’Afrique du Sud , le Mexique ou la Croatie. Voronine s’était même demandé s’il n’avait pas été un peu espion à ses heures perdues, car dans certains pays, à peine l’horloger n’y était-il allé, qu’un conflit avait éclaté… Il avait bien essayé de le cuisiner, mais sans succès, l’horloger disert le plus souvent, devenant soudainement muet comme une carpe dans un sourire énigmatique. Le mystère restait entier…
Le voyant pensif, Michel Fréret-Roy reprit la main ou plutôt la parole… Il regardait avec attention le géant vêtu avec une élégance qu’il ne lui connaissait pas. Je vois que tu as adopté l'une de mes marques préférées, c’est d’ailleurs aussi ce que je porte aujourd’hui lui dit-il alors ! Nous sommes presque jumeaux ! Bravo, mes plus vives félicitations. Cette nouvelle tenue va vraiment à ravir avec ta Fréret-Roy 1818, et ce disant il regarda le solide poignet du russe ou s’exhibait la montre Cœur Ouvert Nouvelle Vague, à l’envoutante transparence, montée sur son bracelet en caoutchouc à damiers… ! Et effectivement, si le géant russe dépassait en taille le français, il y avait comme un style commun aussi étrange que cela puisse paraître. Un visiteur inopiné aurait pu penser qu’il s’agissait des deux associés de la boutique...